whiskey sour

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Phalanges s’articulent lentement, et au bout des doigts un mégot de cigarette s’éteint peu à peu ; du rouge il vire au gris comme le ciel aujourd’hui. La nuit pèse déjà depuis longtemps sur Combray. Quelques poussières grises volent dans le vent, et il écrase ce qu’il en reste sur un muret avoisinant. Il presse le pas jusqu’au portail du manoir, où il jette un rapide coup d’oeil à son téléphone, encore incapable de retenir le digicode, et il presse grossièrement sur les touches avant de s’enfoncer jusqu’à la demeure comme on progresse en terrain conquis. Les habitudes de traîner chez les uns comme chez les autres se sont prises au fil des ans, et se sont installées assez naturellement. Au départ il y avait Sib et lui, puis Leo, suivi de Sohel et plus récemment Aude qui elle aussi s’inscrit de plus en plus nettement dans le paysage en patchwork de leur bande de bras-cassés.

Il cogne du dos de la main trois coups sec contre la porte, et il attend sa partner in crime de ce soir. L’air est encore frais, et il remonte sa capuche sur ses oreilles en grommelant - songe que l’autre se fait attendre et frappe encore, avec un peu plus d’insistance cette fois. Invitation improvisée, la seule promesse est celle de regarder un bon film - ou un mauvais nanar - en compagnie de la chanteuse. Dans ses poches, il n’a pas pris soin d’emmener grand chose, si ce n’est un peu de nicotine et ses clés ; dans son sac en revanche, traînent quelques paquets de chips et l’habituel fatras qu’Elijah trimballe avec lui - albums abîmés, médiators écornés, bouquins aux couvertures pliées…

Finalement, la porte s’entrouvre et un visage familier s’immisce dans l’interstice. Hey. Il caille c’est horrible, pis j’ai cru que t’allais me planter là. Tu faisais quoi ? Il se glisse aussitôt à l’intérieur, et un soupir satisfait lui échappe. Je voulais emmener des bières, mais j’avais plus rien chez moi, alors j’ai pris des chips.

whiskey sour

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esprit agité d'un tintamarre inhabituel ;; c'est le chaos qui règne sur ses pensées dans un manège qui n'en peut plus de tourner. encore une fois l'invitation avait été déclinée, un mal de crâne pour bonne excuse... dès qu'elle avait entrevu un certain prénom dans la liste des conviés, sohel s'était résignée à se morfondre dans une solitude choisie. pas de fiesta pour elle ; et après quelques pérégrinations dans le manoir n'offrant qu'un écho silencieux pour ses soupirs, quelques sms avaient su lui trouver un allié de taille contre les réflexions alambiquées. comme un souvenir lointain se désagrège le temps où il se montrait distant: faut dire qu'elle avait tout fait pour entrer dans ses bonnes grâces (regarde, c'est pas plus simple de m'aimer?). c'est dans l'attente d'elijah que l'espiègle s'agite - gravite ici et là à la recherche de ce qui l'éloignera de l'ennui et tout ce qui s'en suit.

récolte victorieuse ! dans la pièce qui lui sert désormais de salle de cinéma (bye le bureau de papa) elle dépose ses précieux trophées: deux matelas, une montagne de coussins, une bonne bouteille de whisky chipée dans la réserve, un vieux chandelier dont elle ranime les flammes... pour parfaire le décor elle éteint la lumière et ouvre la fenêtre: les rideaux rouges ondulent lentement dans une frénésie presque inquiétante. trois coups (encore) ;; plus impatients que ceux qu'elle avait précédemment fait mine de ne pas entendre. sourire en coin, sohel se dirige enfin vers la porte d'entrée.

elijah ▬  hey. il caille c’est horrible, pis j’ai cru que t’allais me planter là. tu faisais quoi ?

sohel ▬  du calme princesse ! ton chevalier servant est enfin là... whaa - okay c'est vrai qu'il fait froid.

fausse révérence avant de s'écarter pour lui laisser la place de venir se nicher au chaud ; sans regret elle claque la porte derrière lui en songeant que les effets fantomatiques de la fenêtre n'allaient pas faire long feu (préférer la survie à la mise en scène).

elijah ▬ je voulais emmener des bières, mais j’avais plus rien chez moi, alors j’ai pris des chips.

sohel ▬  mmh... viens voir.

guide inutile le long du couloir jusqu'à rejoindre l'antre escomptée, elle attrape de la table basse le breuvage à l'étiquette bien noble (trop?). la lui tend, observatrice de ses potentielles réactions.

sohel ▬  tadam ! content d'être venu ?

rire léger, sohel se sent déjà mieux rien qu'en l'ayant à ses côtés... la bouille du garçon l'éloigne de ses rêveries et regrets ; il la rend moins pénible, leur réalité. elle ne l'invite pas à faire comme chez lui: elijah sait déjà qu'ici il peut être roi (dans la cour des grands enfants, rien que ça).

sohel ▬  je suis plutôt chaud pour un film d'horreur... l'ambiance est parfaite pour ça tu trouves pas ? t'as des suggestions ?