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1986
Mugetsu Hasegawa
1986 ZUdtAtut_o pseudo : la pau bleue avatar : umi defoort situation : madeleine, caius, anna... ils tournent dans sa tête et ne partent jamais vraiment. (recherche ardemment cette moitié qu'il espère tant). occupation : facteur. Messages : 57
Mugetsu Hasegawa
1986 ZUdtAtut_o
pseudo : la pau bleue
avatar : umi defoort
situation : madeleine, caius, anna... ils tournent dans sa tête et ne partent jamais vraiment. (recherche ardemment cette moitié qu'il espère tant).
occupation : facteur.
Messages : 57
1986

1986.

new-york ;;
31 décembre ; 16h12.


je fixe le mur blanc devant moi. cela fait trois heures que je le regarde, depuis que nous sommes revenus du déjeuner. j'ai remarqué de la poussière incrustée dans les griffures laissées par les précédents occupants. un trou qui laisse passer les insectes. le dégât des eaux qui a sali la paroi. mais la cloison est toujours blanche. je crois qu'en fait je ne vois plus bien la différence. mes genoux se sont creusés et ma peau s'est rougie à force de supporter le poids de mes coudes - mes jambes ankylosées, je ne les sens plus depuis une heure. sous mes cuisses, la bordure métallique du lit me blesse un peu. je devrais demander à changer le matelas, je ne sens plus que le sommier.
j'ai entrelacé mes doigts. ils forment des nœuds compliqués, que je n'arriverais pas à refaire. je les ai tordus pendant longtemps, alors maintenant, je les laisse reposer. il y a encore dans ma paume la sensation galvanisante du pistolet, qui se propage le long de mon bras - le signe de la victoire. et sur mes chevilles, la sensation du sang qui goutte. pas le mien, celui des perdants. mes pieds tapotent le sol, comme si j'étais encore en pleine course dans new york l'enivrante. je sentirais presque le vent qui hurle dans mes oreilles, mon cœur s'accélère tout comme mes enjambées. ce sont les rues bétonnées, ce sont les néons colorées, chinatown qui laisse place à brooklyn et les touristes qui noient les ombres. ce sont les oiseaux qui fendent les nuages, les gratte-ciel qui se perdent trop haut, le soleil qui disparaît loin, au bout de l'avenue.

j'y suis, maintenant. j'entre dans le métro. le bruit de la ville s'estompe pour laisser place aux murmures, les trains qui freinent et l'odeur catacombe. il y a du monde sur le quai. du retard est annoncé. je peste un peu, comme tout le monde, finis par me faire une raison : il arrivera un jour. je me cogne contre toi. tu fais tomber ton ticket, je le ramasse, excusez-moi... tu tends ta main et mes doigts touchent ta paume. je fixe les jolis dessins que forment tes lignes. le train arrive alors je n'ai même pas le temps d'apercevoir ton visage : la foule nous emporte et je renonce à te chercher - ça serait vain. je croise mon reflet dans les portes qui se referment. j'ai l'air triste. j'ai l'air triste et seul.
j'observe new-york qui tangue en même temps que le métro. les corps qui font des vagues en rythme. c'est doux, comme l'herbe qui ondule dans les champs, sous le vent. c'est comme si tous les américains dansaient, sans mot dire. une valse lente au tempo irrégulier. c'est comme un cœur qui bat quand il connaît la tempête. nous sortons d'un tunnel et je souris en voyant tous les yeux qui se plissent, éblouis par le soleil. les miens aussi suivent la chorégraphie. ma main s'agrippe plus fermement à la barre quand un virage est amorcé, certains perdent l'équilibre, ça me fait sourire. contre ma cuisse, mon smith and wesson se presse un peu plus fort.
je sors à beverly road station dans brooklyn névrosée. les rues s'animent, déjà parées de leurs manteaux de nuit. j'allume une cigarette et tire une bouffée. je m'arrête pour profiter du calme dans cette ville qui ne s'arrête jamais. mes fumerolles grimpent en esquissant des formes vite dissipées. je m'appuie sur un garde-corps et regarde passer les voitures. ma clope s'éteint à cause d'un coup de vent. je fouille dans ma poche et trouve mon briquet au milieu de mes trésors. le feu ne s'allume pas - je savais que j'aurais dû en racheter un. j'abandonne mon plaisir avorté sur la chaussée ; ce vent qui l'a tué l'emportera bientôt.

je pousse la porte de ce bar. la clochette carillonne au dessus de ma tête, le parquet grince sous mes pas. je salue mon frère déjà ivre au comptoir, les verres devant lui ne sont même pas vidés, le liquide scintille encore dans le fond. j'en prends un et le finis. ça me brûle la gorge. je m'assois et michael me serre en silence. tu devrais le ramasser, qu'il me sourit en désignant mon frère. pas besoin, je réponds, indiquant d'un coup de menton le fond de la salle où daniel et brett jouent au billard, il a des potes... j'ai la descente facile, l'alcool glisse, dévale, m'électrise. je jette un coup d'œil aux cadres au-dessus des tireuses à bière. y a des groupes, ce soir ? il me tend un programme, pas grand chose de prévu. ça me manque... il acquiesce - nous ne nous souvenons que trop bien de mon père et de sa trompette, qui aimait tant la scène, qui aimait tant la drogue. je farfouille dans mes poches, pose un billet devant moi. je l'invite, que je siffle, en parlant de mon frère. t'as du feu ? j'ai déjà la cigarette aux lèvres. derrière moi, la porte s'ouvre. c'est toi. le vent s'engouffre, fait frissonner ma peau couleur ébène. michael tend la flamme, je le remercie. je glisse mon gun dans mon dos, au cas où. tu t'assois à côté de moi. tu sens la lavande, ça m'étonne. ici, tout le monde sent le fauve. la mort. la tristesse. je laisse la fumée s'installer entre nous, empoisonner la pièce. michael me ressert. je tourne la tête vers toi.

@sohel dehwar

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